Le mot du jour : pique-nique

Depuis un mois, ou quelque chose comme ça, j’ai une adresse électronique professionnelle qui me permet de recevoir les messages envoyés à l’ensemble des salarié.es de l’entreprise, voire du groupe, notamment ceux qui sont mis à l’affichage. Il y a deux jours, une collègue m’a montré comment accéder à ma boite de réception, ma BAL quoi. J’ai fait le tour des messages reçus depuis environ trois semaines, au cours de mon poste ce matin, étonnée par le nombre : pas moins d’une quarantaine. Rien de fondamental, mais de quoi augmenter le volume des données numériques, par la multiplication des courriels envoyés, données prétendument plus écologiques que l’impression papier parce qu’immatérielles mais qui nécessitent des centres de stockage des dites données bien matériels eux. Ces centres de données sont des bâtiments regroupant des serveurs informatiques très gourmands en énergie. J’ai pris soin de supprimer un maximum des courriels qui m’avaient été adressés d’un simple clic. Dans le lot, il y avait une annonce énervante pour une journée détente en septembre, annonce que j’avais déjà eu l’occasion de voir à l’affichage en cuisine, énervante à cause du vocabulaire employé : « ton pic nic tu apporteras ou aux food trucks tu consommeras » . Consommer, c’est bien le mot, dans l’univers de la langue de Wallstreet…

Je me demande où s’arrêtera l’invasion des anglicismes. Ailleurs, alors que je demandais pourquoi dire vision quest au lieu de quête de vision, on m’a répondu parce que c’est à la mode. L’anglais sonne plus fun et plus hype. C’est même carrément trop cool ! Euh… Il me semble que l’american way of life est quand même quelque peu dépassé non ? Il serait temps de se réveiller…

Pour en revenir à l’affiche, d’une, food truck c’est comme slow food, ou fast food, pour moi c’est non merci. Par respect pour ma langue maternelle et la cuisine française. Parce que les mots sont porteurs de sens : food ce n’est pas appétissant.

De deux, pique-nique , en un seul mot si l’on applique la dernière réforme de l’orthographe, s’écrit en français Q U E en fin de mots et pas C, même si son sens moderne est un emprunt à l’anglais. Récapitulatif de l’article du Dictionnaire culturel en langue française : le sens de « repas pris en commun dans la campagne, en forêt » vient de l’anglais picnic, lui-même emprunté au français, pour désigner un repas fait en commun en plein air. Composé de piquer et nique au sens ancien de « petite chose sans valeur » , pique-nique a d’abord signifié « repas où chacun apporte quelque chose à manger, où chacun paie son écot » . Au XVIIe siècle on parlait de repas à pique-nique.

Ça veut dire quoi d’écrire Pic Nic aujourd’hui ? C’est pour économiser quatre lettres ? De la place sur la page ?  En tous cas, c’est moche.
Autant que food truck
Ou vision quest (là c’est carrément ridicule)
Ou flow
Ou level

C’est moche et polluant, comme l’ultralibéralisme.